Jude.R
Résumé éditeur :
1970, Jude.R, vingt-sept ans, individu instable, traverse les Etats-Unis d’est en ouest. Depuis deux ans, il fait le même trajet, passe par les mêmes villes, voit les mêmes personnes, de manière systématique et obsessionnelle.
Fils d’un repris de justice au nom malheureusement célèbre, à la recherche de ses origines et animé d’un fort désir de vengeance, il refait inlassablement le même parcours.
Il rencontre Lipi, gamine de quinze ans, aussi perdue que lui. Sorte de gavroche à l’américaine, on la surnomme » la main d or « , pour sa chance insolente au poker.
Mais jude.R, traine de vieilles casseroles, et un homme, Bill Rollins, compte bien lui faire la peau.
Commence alors une violente course poursuite.
Jude.R qui est en plein voyage initiatique, se retrouve confronté à son passé au point de devoir faire des choix corsés, et Lipi, évoluant malgré elle dans un climat de haine qui lui était jusqu’ici étranger, s’attache de plus en plus à ce drôle de personnage.Shaké Mouradian Jude.R
Jude.R transpire l’Amérique profonde des années 70, on pourrait croire que ce roman est écrit par un vieil auteur américain buriné au whisky. Mais il n’en est rien, l’auteur est une jeune femme de 22 ans. Ce qui démontre tout le talent de la demoiselle qui nous emporte dans cet univers.
Dans un style vif, sans temps mort, Shaké Mouradian retrace la folle chevauchée d’un couple improbable entre Jude.R, le fils de l’assassin de Martin Luther King et une jeune adolescente Lippi.
Ces deux personnages diamétralement opposés sont l’un des points forts de ce roman. Ces deux caractères bien trempés, au passé abimé, donnent lieu à quelques répliques savoureuses.
Le duo fonctionne parfaitement, tel de nouveaux Bonnie and Clyde des temps modernes, référence d’ailleurs citée dans le roman. Mais si je devais comparer ce roman à d’autres road movie cinématographiques, je pencherai plus vers Thelma et Louise pour les grands espaces et Sailor et Lula pour la galerie de personnages hors du commun de Jude.R qui pourrait avoir sa place dans l’œuvre de David Lynch.
Chaque personnage est bien défini et fonctionne régulièrement en duo donnant ainsi une interaction constante dans le récit et les dialogues. Certains personnages et leurs histoires auraient même mérité d’être encore plus développés. On retrouve également le coté cinématographique de l’écriture, dans les scènes d’action bien orchestrées et saignantes comme du Tarantino.
Mais Shaké Mouradian va plus loin que le simple road movie. Jude.R, par son personnage principal, aborde le sujet du poids de l’héritage et ses conséquences. Shaké Mouradian traite de façon subtile le racisme, le Ku Klux Klan et la place de la communauté noire dans les années 70. Ce qui résonne particulièrement avec l’élection récente d’Obama. On notera également la justesse des faits historiques évoqués au cours du récit.
On peut noter néanmoins quelques défauts d’un premier roman avec quelques rebondissements un peu faciles et un final un peu abrupt. Mais des petits défauts qui ne nuisent pas au plaisir de lecture de ce roman avec une mention spéciale pour la première partie du récit des plus emballantes.
Shaké Mouradian a un style avec une écriture habile, empreinte parfois de poésie et a déjà un réel savoir-faire pour camper des personnages originaux.
Shaké Mouradian est donc une plume à suivre.
Jude.R, parution novembre 2011, Éditions My Major Compagny Books avec XO édition
Du même auteur : Biographie, chronique, interview
