Patrick Senécal

 

 
 
 
Patrick Senécal





La première scène de Hell.com se déroule dans une église désacralisée, j'imagine que ce n'est pas un hasard de votre part ? Avez-vous voulu y évoquer une symbolique développée dans votre roman ?
Évidemment, ce n’est pas par hasard. Même la première phrase va dans ce sens : Daniel prend une croix et la jette rageusement au sol. Évidemment, cela fait référence au fait que la religion catholique a de moins en moins de place au Québec et, j’imagine, dans bien des pays occidentaux. Moi, je n’ai rien contre l’idée de se débarrasser de la religion, mais on la remplace par quoi ? C’est pour cela qu’il y a beaucoup de références religieuses dans le roman, pour montrer que même si on n’est plus religieux, les valeurs et la morale doivent avoir encore leur place dans une société responsable. L’Enfer n’est plus sous terre, mais dans les ordinateurs. On ne signe plus de pacte avec le Diable, mais on se met membre de sites illégaux horribles. Et même si on ne croit plus en Dieu, on peut tout de même perdre son âme, c’est à dire sa dignité d’humain responsable. Et c’est ce qu’apprendra Daniel Saul à ses dépens. Donc, le fait qu’il utilise des églises désacralisées pour en faire des bâtiments modernes et qu’il jette au sol des croix démontre qu’il se croit au-dessus de toute morale, de toute responsabilité. Le roman ne veut pas dire qu’il faut revenir à Dieu, mais revenir à une morale fondamentale et humaine. Nous sommes Dieu ou nous sommes le Diable, nous faisons le choix tous les jours par nos actions.



Hell.com - Patrick Senécal Tout au long du roman, le vocabulaire religieux est utilisé (déemon, damné, dieux, enfer...), quel rapport avez-vous avec la religion ?
En fait, je crois avoir répondu à cette question dans la première. :)


Le site internet Hell.com nous fait forcément penser au dark net: êtes-vous déjà allé sur le dark net ? Qu'en pensez-vous ?
Je n’y suis jamais allé et cela ne m’intéresse pas. J’écris sur l’horreur humaine parce qu’elle m’inquiète, parce qu’elle m’intéresse comme phénomène, mais pas parce que j’aime la voir. Regarder de la vraie violence sur internet, c’est donner raison à ceux qui la diffusent, et ça, je refuse d’en devenir le complice. Quand j’ai écrit le roman en 2009, le terme Darknet n’existait pas vraiment, mais je me disais qu’il n’y avait aucune raison que de telles choses horribles et underground existent sur le Net. Vous imaginez les possibilités qu’offre la toile à des gens tordus? Quand hell.com est sorti en 2009, les gens ont vraiment été terrifiés parce que tout à coup, ils se disaient: « Mais est-ce que de telles choses sont possibles? ». Maintenant, nous savons que oui. Ça prouve encore une fois que même si mes romans sont horribles, je n’invente hélas pas grand chose et la réalité l’est tout autant.



Auriez-vous écrit encore Le même roman aujourd'hui ou auriez-vous été encore plus loin ?
Franchement, je ne vois pas pourquoi j’irais plus loin. En fait, oui, il est toujours possible d’aller plus loin, mais cela peut devenir grotesque. Je crois que hell.com est allé aussi loin qu’il pouvait aller dans l’horreur sans verser dans la complaisance. Évidemment, si je l’écrivais aujourd’hui, il y aurait sans doute des ajustements technologiques, mais le fond resterait le même. Ah, oui, un autre truc changerait : Facebook prendrait plus de place. Je ne sais pas comment, mais je n’aurais pas le choix.

Merci beaucoup Patrick Senécal.

Et pour en savoir plus sur l'univers de Patrick Senécal, rendez-vous sur l'interview qu'il nous a accordé en décembre 2015.


 Du même auteur biographie, chronique, interview
 
Go to top