Dillard Vs Norek

 

François-Xavier Dillard VS Olivier Norek



François-Xavier Dillard :  Bon alors, encore un flic qui écrit des polars... Est-ce que j'écris des livres sur l'énergie moi hein?
Alors dis-nous un peu, ça a quoi de plus un polar écrit par un policier?
    Olivier Norek : On y trouve des trucs en plus, comme la certitude d’une véracité procédurale, d’un réalisme d’enquête et même parfois quelques histoires vraies perdues dans un flot de romance. On y trouve parfois des trucs en moins, comme le grain de folie de celui qui ne sait pas tout et qui invente… Pour ma part, je mélange les deux, du vrai et du fantasme… sauf pour ce qui concerne le déroulement de l’enquête et j’y tiens : c’est comme ça qu’on bosse, c’est comme ça que se déroule une affaire. Promis.

 

FXD :  Dis-nous la vérité, c'est arrivé comment cette histoire d'écriture... Tu étais où, avec qui ? Et sois précis essaie pas de nous embrouiller!
    ON : Ah d’accord… en mode audition de garde à vue… ça marche. Tout a commencé par un frais matin de je sais plus quand… J’ai reçu un mail du site au féminin.com pour participer à un concours de nouvelles. Je me lance, je gagne la troisième place et je vais chercher mon prix. Au féminin.com, alors évidemment, j’ai écrit un truc « girly », si bien que les organisateurs pensaient que j’étais une femme. Oups. Mais lors de la cérémonie, une « chasseuse de talent » m’a demandé si je me sentais capable d’écrire un polar sur mon quotidien de flic du 93 avec la sensibilité dont j’avais fait preuve dans ma nouvelle… et Code 93 est né. J’ai donc commencé à écrire il y a 4 ans.



Surtensions - Olivier NorekFXD : OK... Et tu dois bien avoir une méthode non. C'est quoi ton truc pour écrire, tu repères les lieux, tu montes ton plan, et après c'est tous les jours ta petite routine. On sait bien que tu prépares chacun de tes coups. Fais pas le malin.
    ON : J’avoue. T’es trop fort. Je prépare un coup : il s’appelle Surtensions et il sort le 31 mars 2016. Pour écrire, je construis l’intrigue en entier. Pas de surprise me concernant, je les réserve aux lecteurs ! Chapitre après chapitre, je sais exactement ce que je vais utiliser comme ressort d’intrigue, d’enquête et de suspense. Même ma scène finale, je la connais avant d’écrire ne serait-ce que le prologue.
D’ailleurs, toit aussi tu sors en mars 2016… ce serait cool que ton prochain soit moins bon que tes deux premiers, commercialement ça m’arrangerait…



FXD : Et sinon parle-nous un peu de tes complices. Des gros coups comme ça on les fait pas seul. Qui t'appuie sur tes plans, c'est qui tes soutiens, c'est quoi ton réseau ? Vas y parle!

    ON : Ouais j’ai des complices mais je préfère crever que de balancer. (FXD se lève et comme il est imposant – si, si, faut voir le bébé - je me ravise et je crache le morceau). Comme pour une enquête, je m’entoure de professionnels et d’experts. Un bon flic n’est pas un fic qui sait tout sur tout mais un flic qui sait quelle est la bonne personne à utiliser au bon moment. Alors la liste est longue mon pauvre : légistes, surveillants de prison, anciens criminels, juges, avocats, techniciens de scène de crime, techniciens ADN, artificiers, politiques, journalistes… et seulement les meilleurs, bien sûr.


FXD : Bon, flic, écrivain, ça te fait déjà deux vies...qu'est-ce que tu nous prépares encore. Si je te disais là maintenant, OK je te lâche, fais-toi oublier. Tu choisis quoi comme nouvelle vie ?
    ON : L’enfer c’est les autres. J’ai besoin d’être utile pour me sentir exister. J’ai besoin du regard de l’autre pour m’aimer. Alors ce serait un métier de partage ou d’aide. Flic et auteur, déjà fait. Missions humanitaires, déjà fait aussi… mais j’étais un peu trop jeune et je m’y suis brûlé l’âme, sans vouloir faire dans le pathos… alors je crois que maintenant que je suis un grand garçon, je retenterai l’expérience des missions humanitaires.


FXD : D'accord, une dernière question, on a eu une info... Et cette fois Norek je veux pas de baratin! C'est quoi cette histoire d'adaptation de Code 93, c'est un gros coup que tu nous prépares!
    ON : C’est un peu comme aller sur Mars, on en parle depuis longtemps… le seul hic pour les chaînes françaises, c’est la violence de certaines scènes et l’œil un peu trop acerbe que je porte sur la société… ils me demandent souvent : Code 93 est super, ce serait possible de le faire avec moins de meurtres et plus de politique ? J’ai peur de trahir Coste et parfois, il vaut mieux attendre que de faire une moitié de projet qui ne satisfait personne. Mais je n’abandonnerai jamais cette idée… d’ailleurs je dois rencontrer quelques personnes qui veulent tenter le coup. 2016 risque d’être une année magnifique.
Vas y, maintenant laisse moi sortir sinon je sors ton casier judiciaire et je le colle en haut de ma page facebook !!!

FXD : Allez Norek, je vais te relâcher pour cette fois mais fais pas le malin parce qu'on sait tous que tu es coupable, forcement coupable au moins d'avoir commis.... De très bons bouquins!
    ON : Merci à toi FX

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Olivier Norek : Dans un de tes romans, cite moi une phrase dont tu es fier. Et dis-moi pourquoi… 
    François-Xavier Dillard : « Et c'était comme quatre coups brefs que je frappais sur la porte du malheur. » Ha non mince ça c’est Camus mais j’aurais bien aimé l’écrire celle-là …
Je trouve cette question un peu trop narcissique cher Olivier, un peu égocentrée en fait, ça manque de simplicité quoi, d’humilité, toutes ces qualités qui me caractérisent si bien. D’autant plus que j’aime toutes les phrases de tous mes livres, elles sont tellement formidables. Difficile de faire un choix au milieu de toutes ces merveilles. Je laisse donc aux lecteurs ce choix cornélien et à eux de me dire pourquoi.

ON : Si tu pouvais voler l’idée et le roman de quelqu’un, quel livre aurais-tu aimé écrire et pourquoi ?
    FXD : «L’étranger», encore Camus, pour sa radicalité, la simplicité de son écriture et la complexité de Meursault. Bon aussi un peu pour les chiffres de ventes bien sur :) . J’aurai aussi adoré écrire «La conjuration des imbéciles» de John Kennedy Toole parce que c’est drôle, corrosif, excessif, parce qu’Ignatius son antihéros est une sorte de rebelle hystérique et pathétique qui porte sur le monde un regard à la fois lucide et fou. Mais pas pour l’histoire personnelle de l’auteur qui est assez dramatique et qui démontre bien, s’il fallait encore le faire, que les mamans sont formidables.

ON : Tu connais le monde entier, tout le monde t’adore, ton répertoire est sans fin… Tu organises un dîner et convie cinq personnes. Compose la table ultime et cite nous tes invités.
    FXD :
1- Mon épouse parce que ce serait d’une grossièreté absolue de ne pas l’inviter
2- Hannibal Lecter parce que tant qu’à faire à avoir un psychopathe à table autant que ce soit un fin gourmet.
3- Le Pape parce que c’est quand même ultra chic de l’avoir à sa table
4- Nabila parce que c’est quand même ultra drôle de l’avoir à sa table et que si jamais Hannibal s’énerve elle pourra toujours lui filer des coups de couteau.
5- J.K. Rowling pour qu’elle paie l’addition.

Austerlitz 10.50 d'Anne-Laure BEATRIX et François-Xavier DILLARDON : Tu es en speed-dating auteur/lecteur. Tu as trois lignes pour convaincre le lecteur de te choisir parmi les 1800 auteurs de polars qui sortent par an…
    FXD : « Pour tout livre acheté une dédicace offerte !!! ».
Plus sérieusement, je trouve ça affreux de tenter de convaincre un lecteur. Je vois parfois des auteurs le faire dans certains salons et je trouve que c’est juste pathétique… En général je demande aux lecteurs de me parler d’eux, de ce qu’ils aiment dans la vie, je leur demande aussi pourquoi ils ont décidé de s’arrêter devant mes livres, ce qui a attiré leur regard, ce qui résonne en eux dans un titre, une couverture… Parfois on ne parle même pas vraiment de mon livre et… ils le prennent quand même ha !ha !ha! Ma stratégie est diabolique!

ON : Après un entrelacs de destins où tous les protagonistes pensaient s’en sortir comme dans un jeu d’enfant, après une mère manipulatrice… ça te dirait de nous mettre l’eau à la bouche avec ton prochain bébé qui sort en mars 2016 si je ne m’abuse…
    FXD : Tu ne t’abuses pas, «Austerlitz 10.5» sort bien le 17 mars 2016 chez Belfond et c’est assez drôle que tu parles de vous «mettre l’eau à la bouche» parce que de l’eau il va y en avoir beaucoup dans ce livre… En plus, c’est une première pour moi je coécris ce livre avec une amie, Anne-Laure Béatrix, historienne et directrice des relations extérieures du Louvre. C’est une histoire que nous avons voulu épique, n’ayons pas peur des mots ! Une histoire où se mêlent meurtres rituels, scènes catastrophes, intrigues politiques, trafic d’œuvres d’arts, amours, détestation, larmes, sang, recherche d’absolu, rédemption impossible, trahisons douloureuses , souffrances éternelles…Un peu comme l’ancien testament, le suspens et la modernité en plus ! En toute simplicité bien sur (cf question 1).


ON : Les auteurs ont de sales manies… décris nous ton poste de travail et ton cérémonial d’écriture…

    FXD : J’écris le plus souvent nu, debout, avec une plume d ‘Autruche (dans la main), En particulier les soirs ou la lune est gibbeuse tout en buvant du Haut-Brion 78 et en écoutant du Xenakis. Encore des choses simples en fait ;)
Mais non, en fait j’écris quand je peux, dès que je peux et comme je peux parce qu’avec un job à plein temps, trois enfants et une épouse qui aime bien me parler de temps en temps quand même et bien je n’ai pas du tout le luxe de me payer une routine d’écrivain ou des rituels exigeants. Mais en même temps je crois que cette urgence d’écriture et cette absence de cérémonial est souvent source de créativité ! Enfin ça sont les lecteurs qui le diront.

Merci Olivier pour ces chouettes questions et surtout merci de ne pas m’avoir tabassé pendant cet interrogatoire, c’est vraiment sympa :) !

 

  Du même auteur Olivier Norek : Biographie, chronique, interview
  
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