Marie Neuser

 

 
 
Marie Neuser

 

Bonjour Marie Neuser, commençons par le petit rituel de la première interview sur Plume Libre. Pouvez-vous vous présenter ?
Je vis à Marseille, la ville où je suis née mais où je n’ai pas vécu jusqu’en 1995, je suis enseignante d’italien, et j’essaie de caser le travail d’écriture entre mes copies et mes cours !


Qu'est-ce qui vous a décidé à vous lancer dans l'écriture de romans ?

Je ne me suis jamais lancée, je n’ai jamais rien décidé. L’écriture est venue à moi quand j’étais enfant. Elle a toujours fait partie de moi. J’ai toujours rempli des pages de cahiers, de façon un peu maniaque, et dès le collège j’ai commencé à écrire des histoires.


Vous venez de publier le dyptique Prendre femme (Prendre Lily et Prendre Gloria) chez Fleuve Editions. Pouvez-vous nous présenter ces romans ? ?
Les deux parties de ce diptyque constituent une sorte de fresque judiciaire extrêmement accrochée au réalisme d’une enquête. Le dénominateur commun est un tueur, le même sur les 2 tomes : tout le monde le sait coupable des meurtres de deux femmes, peut-être trois. Le tout est d’arriver à le coincer. En fait, c’est la traque d’un coupable identifié.


Prendre Lily - Marie NeuserD’ailleurs, les titres de ces romans ont-ils été une évidence dès le départ ?
Je n’ai pas écrit ces romans sous ces titres. Le hasard a fait que, pendant que j’écrivais, un roman scandinave est sorti avec le titre que j’avais choisi ! Il est difficile de changer de prénom à un enfant quand il existe déjà ! J’ai donc fait d’autres propositions à mon éditrice et quand j’ai prononcé « Prendre Femme », ça a semblé parfaitement évident.


Ces romans sont tirés d’une histoire vraie, quel a été le déclic qui vous a donné envie d’écrire sur ce fait divers ?
Le caractère ahurissant du fait divers a été le déclic. J’ai lu sur un blog qu’un lecteur estimait cette enquête « banale » : je ne sais pas ce qui lui faut ! Dix-sept ans de traque d’un tueur dont le nom était déjà sur toutes les lèvres, le tout à base de mèches de cheveux volées dans des bus, de curés douteux, de magistrats marrons, de faux témoignages pris comme parole d’évangile et d’innocents harcelés, de témoins morts à point nommé, de boutons de soutane, et du corps d’une adolescente se décomposant dans le toit d’une église… Je n’ai rien inventé ! Entrer dans cette histoire, c’est comme monter sur des montagnes russes.


Comment avez-vous travaillé ?
Beaucoup de recherches dans un premier temps, des frises chronologiques infinies, des centaines d’articles de presse et d’heures de reportages télévisés patiemment épluchées, avant d’obtenir une colonne vertébrale narrative. Puis, je me suis coulée dans chacun des personnages pour reconstituer le puzzle pièce par pièce.


Le travail de la romancière a-t-il été compliqué pour relier les différents faits entre eux, développer la psychologie des différents protagonistes, etc… ?
Non, pas du tout, ça a même été l’aspect le plus évident du travail. Mon dada d’écrivain, c’est l‘analyse psychologique. Une fois que j’ai compris quelles avaient été les implications des uns et des autres au cœur de l’affaire, il m’a suffi d’ouvrir la boîte de l’empathie et de les faire parler.


Avez-vous rencontré des personnes proches de l’enquête ?
Non. J’y avais songé dans un premier temps, mais ensuite je me suis rendu compte que je n’avais ni le temps, ni intérêt à le faire. Je ne suis pas journaliste, je suis romancière.


Prendre Gloria - Marie NeuserPourquoi avoir fait le choix de sortir Prendre Gloria (qui se déroule avant) après Prendre Lily ? Pourquoi ne pas avoir respecter l’ordre chronologique ?
C’est un choix éditorial qui m’a semblé très judicieux. D’abord la traque sous forme de thriller, puis la fresque sociologique et psychologique qui permet de comprendre comment une société entière a fabriqué le « monstre ».


Prendre Gloria met en scène de nombreux personnages. Votre style change du tout au tout selon les personnages, est-ce un exercice difficile à réaliser ?
Pas du tout. Quand on a un personnage dans la tête, il a forcément un vocabulaire, un rythme, un niveau de langue. Il suffit de l’écouter.


J’ai beaucoup apprécié la construction de Prendre Gloria (les multiples personnages et les aller-retour dans le temps) mais n’avez-vous pas eu peur à un moment de déstabiliser ou de perdre le lecteur ?
Je suis toujours étonnée d’entendre certaines personnes dire que la présence de multiples personnages rend une lecture difficile. Je serais d’ailleurs un peu sévère en prétendant que si la lecture devait être un exercice « facile », ça se saurait. Proust et Dostoïevski se retourneraient dans leurs tombes ! Quant à la construction, je me suis, il est vrai, un peu inquiétée au début, mais mes premiers lecteurs fidèles m’ont assurée que cela ne gênait absolument pas la compréhension. Quoi qu’il en soit, « Gloria » ne pouvait être racontée que de cette manière. Les implications ne découlent pas de la chronologie mais des lièvres qu’on débusque au fur et à mesure.


Etes-vous, vous-même, une lectrice ? Quels sont vos derniers coups de cœur et/ou vos livres de chevet ?

Peut-on écrire si on ne lit pas ? Evidemment, je suis une lectrice. Moins que je le voudrais, hélas, car mon métier me prend énormément de temps et d’énergie intellectuelle et que les journées ne sont pas élastiques ! Mais j’ai toujours un livre en train, sur ma table de chevet ou dans mon sac, et c’est mon activité principale pendant les vacances. Mon dernier énorme coup de cœur est City on fire de Garth Risk Hallberg, fresque sociale, psychologique et punk dans le New-York des années 70. Un régal. 1000 pages extrêmement addictives.


Quels sont vos projets ?
Trouver du temps pour continuer à écrire !


Merci beaucoup Marie Neuser, nous vous laissons le mot de la fin.
Merci à vous pour tout ce que vous faites pour nous, humbles auteurs !



 Du même auteur : Biographie, chronique, interview



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