Edouard Brasey







Mai 2009

 



Bonjour Edouard Brasey, auteur, conteur, directeur de collection ... Mais qui est vraiment Edouard Brasey ?

Ah, grande question ! Le sais-je moi-même ? Je suis un peu touche à tout, c'est vrai, mais c'est surtout l'écriture qui me porte. Et le roman, avant tout. Je suis malheureux quand je demeure trop longtemps sans inventer des histoires et les mettre en mots et en phrases...


Première publication : parcourt du combattant ou chemin tranquille ?
Combattant ! J'ai commencé à écrire vraiment en 1971, et n'ai été publié - il s'agissait d'un essai journalistique - qu'en 1987. Mon « premier » roman n'a été publié qu'en 1994, mais j'en avais des dizaines dans mes tiroirs...


L'envie d'écrire a-t-elle toujours était présente dans votre vie ?
Oui, sincèrement, j'ai toujours voulu écrire, même avant de savoir lire... Et avant même d'écrire, j'avais l'ambition d'être écrivain. Rejoindre le cercle fermé des dandies de l'écriture... Se définir par un usage personnel de la phrase, du style, du ton employé. Refuser les contingences du quotidien. S'occuper en priorité de cette chose inutile et essentielle : la littérature.


Avez-vous toujours voulu conter/écrire sur l'univers du merveilleux ou l'envie de changer de registre vous -a-t-elle effleurée ?
Je n'ai pas toujours écrit sur le merveilleux ; c'est venu « par hasard », il y a une quinzaine ou plutôt une vingtaine d'années. Je trouvais l'invisible plus passionnant que le réel. Quant à l'avenir, j'ai en effet des projets romanesques qui échapperont sans doute à la stricte définition de ce que l'on nomme « Fantasy ». Mais il y aura toujours un fonds de merveilleux, oui...


Comment s'y prend-t-on pour réunir les informations sur les peuples du merveilleux et du fantastique ? Consultation d'ouvrages particulier, observation sur place (!), un peu d'imagination, ... ?
Oh ! Beaucoup de lectures, avant tout ! Et de fréquentation studieuse des bibliothèques et des librairies ! Ensuite, eh bien le bouche à oreille prend le relais ; les rencontres, les rêves, la pensée symbolique...  


Le talent de conteur que vous possédez est-il inné ? Appliquez-vous une méthode particulière pour nous immerger aussi vite dans l'histoire ?
Inné, certainement pas ! Travaillé non plus, d'ailleurs. Je crois qu'il s'agit avant tout d'un désir. Un désir de raconter, avec la plume ou avec la voix... Dans une autre époque, je me serais bien vu scalde ou barde...


Comment travaille-t-on sur des livres illustrés : vous écrivez les textes et le dessinateur les illustre ? Est-ce parfois l'inverse, le dessin qui sert d'inspiration à l'écrivain ?
Non, l'illustration vient toujours en appui du texte. Mais on pourrait imaginer l'inverse, pourquoi pas ? En l'occurrence, les livres illustrés dont je suis l'auteur s'inscrivaient jusqu'à présent dans une démarche « encyclopédique ». Donc, l'imagination était volontairement assujettie aux sources mythologiques, légendaires et folkloriques... Mais j'écrirais bien à partir d'illustrations originales ou de photographies...


Vous vous êtes lancé dans une tâche extraordinaire avec « La Malédiction de l'Anneau » (le tome 2 « Le Sommeil du Dragon » est sortit le 7 mai). Comment est né ce projet ?
Il y a plus de trente ans ! A 17 ans mes musiciens préférés étaient Richard Wagner et les Beatles ! Mes albums culte : « Sgt Peppers » et « La Walkyrie » ! J'écoutais la Walkyrie en boucle sur mon pick up, dans la version Solti. Et puis je suis allé à Bayreuth en 1976, pour le « Ring du centenaire » de Pierre Boulez et Patrice Chéreau qui ont dépoussiéré l'opéra wagnérien. Je faisais du camping sauvage et mangeais sur un réchaud à gaz ; chaque après midi je tentais ma chance pour entrer dans la prestigieuse salle du Festspielhaus ! La « Tétralogie » me faisait rêver, autant que « Le Seigneur des anneaux » de Tolkien que j'ai découvert à la même époque. Lorsque, plus tard, j'ai appris que Wagner et Tolkien s'étaient eux-mêmes inspirés des anciennes mythologies nordiques, je me suis dis : pourquoi pas moi ? Mes romans s'inscrivent donc dans une démarche commune à ces grands maîtres, mais avec une ambition différente : restituer dans un contexte de roman d'aventure le souffle épique des anciennes légendes...


La mythologie est un sujet qui à été traiter de nombreuse fois, mais plus rare sont ceux qui se frottent aux légendes nordique, pourquoi ce choix ?
Eh bien, justement parce que cette mythologie, si riche, est méconnue chez nous ! Il faut dire qu'elle a été manipulée de façon tendancieuse durant la deuxième guerre mondiale, et demeure encore suspecte aux yeux de certains. Pourtant il s'agit d'une mythologie profondément humaniste, voire féministe ! Les dieux sont soumis au Destin tout puissant, et les femmes sont plus fortes, plus fidèles et plus volontaires que les hommes... Brunehilde, par exemple, est l'exemple même de la vierge quasi divine qui choisit de devenir femme, et mère... A ses yeux, l'humanité est plus noble que la divinité...


Pouvez-vous nous présenter cette série ?
Dans le premier tome de « La Malédiction de l'anneau », intitulé « Les Chants de la Walkyrie », je plante le décor de la saga : les neuf mondes, dont celui des hommes, Midgard, la mission confiée par Odin, le dieu suprême, à sa fille Brunehilde, destinée à sauver sa lignée humaine, le rôle pernicieux de Loki, le génie du feu et de la ruse. L'histoire est vue du point de vue de Brunehilde, la Walkyrie. Dans le second tome, « Le Sommeil du dragon », changement de décor : l'action se déroule dans la Forêt de fer, et est centrée sur l'éducation de Siegfried par le géant Regin, puis sur l'affrontement entre le héros et le dragon Fafnir. L'action est d'ailleurs commentée par ce dernier, alors qu'il doit mourir avant le fin du roman. Les deux prochains tomes seront également narrés d'un point de vue à chaque fois différent et non humain : « Le Trésor du Rhin » sera commenté par le Rhin et racontera les intrigues à la cour des Burgondes entre Brunehilde et Kriemhilde se disputant l'amour de Siegfried ; « Le Brasier des dieux » évoquera le crépuscule des dieux, vu du point de vue de l'anneau maudit...


Habituellement, les Dieux sont présentés comme des êtres sans peurs. Dans vos livres, Odin apparaît plein de doutes, allant même jusqu'à baisser l'échine devant la force du destin. Ce qui voudrait dire que les Dieux ne sont pas si éloignés des humains ?
Ceci est propre à la mythologie nordique, je pense. Les dieux ne sont ni tout-puissants, ni immortels. Ils sont inféodés aux arrêts du Destin, et aussi à ceux des puissances des origines : Erda, la Terre, la Völa, la voyante, les Nornes prophétesses, les dragons... Ils sont aussi soumis aux serments qu'ils ont fait aux géants, par exemple, et qu'ils ne savent pas tenir...


On ne peut parler d'Odin sans penser à Loki, perfide, manipulateur, déloyal et pourtant il est l'un des personnages que nous avons (et nous ne sommes pas les seuls) préféré. Auriez-vous une explication à tout ça ?
Loki, c'est Satan sans l'enfer ! Il est roué, rusé, malin, il manipule tout le monde et pourtant on ne parvient pas à lui en vouloir. Contrairement aux dieux, il est le seul à être entièrement libre... Pour le meilleur et surtout pour le pire...


L'écriture d'un deuxième tome est-elle différente de celle du premier ?
Oui, plus centrée sur l'action, avec une évocation du chamanisme, de la forêt mystérieuse. Je pense que j'ai pris plus d'assurance dans ce deuxième tome, qui ressemble davantage à un roman d'éducation et d'initiation, avec quelques passages épiques de batailles. Mais c'est aux lecteurs de dire ce qu'ils en pensent ! L'écriture des deux autres tomes sera encore différente : drames de cour et intrigues pour le tome 3, Apocalypse et guerre totale pour le tome 4.


Vos ouvrages sont nombreux, par exemple la série des « Petits livres » comment est née cette collection, mais surtout allez-vous nous enchanter avec d'autres personnages féérique ?
L'idée était de décliner la « Petite encyclopédie du merveilleux » en petits ouvrages à conserver dans la poche... Mais y en aura t il d'autres ? Je n'en sais rien encore... Ou plus exactement, je sais qu'il y aura une surprise pour les fêtes de fin d'année ! Mais chut...


Vous avez présenté et adapté le traité de Vampirologie du Dr Van Helsing et le traité de Faërie d'Ismael Mérindol (éd. Le près aux clercs). Comment est né ce projet ?
Il s'agit de traités apocryphes que j'ai eu la chance de découvrir dans d'obscures librairies ou dans des archives de bibliothèques ! Je ne puis jurer de leur authenticité, mais cela fait partie du jeu !


Y en aura-t il d'autres ?
Certainement ! Dès le printemps 2010. Mais chut ! C'est encore secret !


Quels sont vos projets en tant qu'auteur, de conteur et de directeur de collection ?
Eh bien, j'ai mille projets en cours... (ou presque). En tant qu'auteur, je viens de terminer un nouveau tome de l'Encyclopédie du légendaire illustrée par Sandrine Gestin et Didier Graffet qui sortira à l'automne au Pré aux Clercs, et je vais me remettre à l'écriture de mes deux autres tomes de « La Malédiction de l'anneau » pour Belfond. Je vais conter les samedi 23 mai (contes des Mille et une nuits) et 20 juin (contes érotiques) à 17 h au salon de thé Caramelle, 6 rue de l'Arbalète 75005 Paris (réservations au 01 43 36 60 79 ou Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. ). En tant que directeur de collection je vais convaincre Sire Cédric de se remettre très vite à l'ouvrage, et je lis en ce moment des manuscrits fort intéressants en fiction française, qui je l'espère vont déboucher sur des publications au Pré aux Clercs dès le début de 2010. Mais je suis là encore tenu au secret !

Un site, un blog, plusieurs groupes sur Facebook, quel regard portez-vous sur Internet ?
Mon site personnel www.edouardbrasey.com est en pleine refonte, mais j'essaye de tenir à jour mon blog chez Place des éditeurs http://bogs-livres.com/edouard-brasey ainsi que ma page Facebook et mon groupe Facebook consacré à La Malédiction de l'anneau. Tout cela me prend pas mal de temps, mais je trouve qu'internet est aujourd'hui un lieu idéal pour rencontrer et échanger des idées avec mes lecteurs et avec d'autres auteurs. L'écriture est un travail très solitaire. Grâce au web, je suis en prise directe avec des gens très éloignés géographiquement, mais proches par les centres d'intérêt : la Féerie, le merveilleux.... Et lorsque je me rends à des séances de dédicaces ou des salons du livre, de nombreux lecteurs viennent me voir en me disant : « Nous sommes amis sur Facebook » ou « je suis régulièrement votre blog » ou « J'ai lu votre interview sur Plume libre ! ». C'est un vrai plaisir de rencontrer ainsi des « amis virtuels » dans la vraie vie...


Quel livre conseilleriez-vous aux lecteurs qui ne vous connaissent pas encore ?
Les deux tomes de ma saga romanesque, « La Malédiction de l'anneau » chez Belfond, en commençant, pourquoi pas, par le tome 2, « Le Sommeil du dragon », et « La Petite Encyclopédie du merveilleux » au Pré aux Clercs et, pour les plus curieux, l'un des deux traités apocryphes, « Le Traité de vampirologie de Van Helsing » ou « Le Traité de Faërie d'Ismaël Mérindol », tous deux au Pré aux Clercs.


Merci beaucoup Edouard Brasey, nous vous laissons le mot de la fin.
Je citerai mon maître et alter ego du XVe siècle Ismaël Mérindol, le premier des elficologues, qui a écrit notamment cette phrase : « Rien n'existe qui n'ait au préalable été rêvé... »
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